lundi 30 juin 2014

Francis Scott Fitzgerald, Les enfants du Jazz

(Publié le 31 Octobre 2008)
F.Scott . Fitzgerald, Les enfants du Jazz, 1922. Gallimard, 1967, pour la traduction française, Folio, 1978, 436p.

"La sorcière rousse" raconte l'histoire de Merlin Grainger, employé dans la librairie "La plume de lune". Il est séduit par une jeune femme rousse qu'il aperçoit chaque soir à sa fenêtre. Pourtant Merlin est un homme ordinaire qui suit les chemins tracés. Il rêve d'une existence simple avec sa femme Olive, également employée à la librairie : l'amour, un pavillon, des enfants. Mais à différentes étapes de sa vie, Merlin croise Caroline ; il voit un signe du destin dans les rencontres avec cette femme extraordinaire qui incarne un fantasme de liberté. Ni réellement heureux, ni profondément malheureux, Merlin se raccroche à des illusions.
"Le temps écoulé de trente-cinq à soixante-cinq ans défile devant l'esprit passif comme un manège confus et incompréhensible (...) Pour la plupart des hommes et des femmes ces trente années se caractérisent comme une retraite graduelle de la vie" car ils sont " tour à tour pris de peur et de fatigue, dans l'attente de la mort."
J'ai beaucoup aimé cette nouvelle sur un homme qui reste toute sa vie bien plus naïf et rêveur que désenchanté. La plus grande illusion de toutes est... la sorcière rousse!

"Bleu porcelaine et rose chair".
Il s'agit d'une courte scène de théâtre qui oppose deux soeurs, Julie et Lois. Julie, l'insouciante  qui méprise les convenances, joue dans son bain, tandis que sa soeur la presse de sortir de l'eau ; elle doit se préparer pour un rendez-vous avec un homme divorcé dont la mère de Lois réprouve les visites. Là encore, Fitzgerald présente des regards différents, des choix de rébellion face aux règles établies. Julie : "L'expérience est la plus belle escroquerie du monde. Tous les aînés veulent vous en vendre."

Il serait trop long de détailler toutes les nouvelles, mais dans chacune, Fitzgerald décrit ses personnages avec un humour sensible qui les rend particulièrement touchants.
Ils se trompent, se perdent dans un monde qu'ils ne comprennent pas toujours. Fitzgerald montre ces tensions dans la vie de couple et dans l'incompréhension entre parents et enfants. Tous évoluent dans l'insouciance et les rêves de leur jeunesse, puis au fil des ans, dans une société où la générosité et l'amour n'ont plus la même importance. Ils perdent leurs illusions, mais le désenchantement est progressif.
Certains préfèrent même se tenir à l'écart du monde, à l'image de Mather, dans "Chaud et froid" ; il comprend sa vision égoïste et réagit. "Il avait eu une vie exceptionnellement heureuse. Ces heurts d'homme à homme, d'homme à société, où nous nous forgeons, pour la plupart, une cuirasse de cynisme, se caractérisaient par leur rareté. Il ne lui était jamais venu à l'idée qu'il payait le prix de cette immunité, mais, découvrait-il maintenant, il avait constamment choisi le côté rude du chemin, pour éviter l'hostilité ou la discussion, et même la contestation".
Dans "La lie du bonheur", pour Jeffrey et Roxanne Curtain, le prix à payer est plus lourd:
"La vie était venue vite pour ces deux-là et repartie sans laisser d'amertume, mais de la compassion; nulle désillusion mais de la douleur".
Enfin, une nouvelle fantastique, que j'ai également beaucoup aimé, "L'étrange histoire de Benjamin Button", un homme dont la vie se déroule à l'envers: il naît vieillard et meurt nourrisson, affrontant toutes les étapes de la vie dans un contresens permanent.
Les nouvelles :
Guimauve, Le dos du dromadaire, L'étrange histoire de Benjamin Button, Tarquin des bas quartiers, La coupe de cristal taillé, La sorcière rousse, La lie du bonheur, Chaud et froid, Gretchen endormie, Bleu porcelaine et rose chaire, Monsieur Icky, Jemina la fille des montagnes, Rags Martin Jones et le Prince de Galles.


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